Gareth L. Powell by L’éclat d’étoiles impossibles

Auteur:L’éclat d’étoiles impossibles [L’éclat d’étoiles impossibles]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

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Sal Konstanz

Mon adhésion à la Maison de la Récupération avait été motivée par un désir sincère de rendre l’univers meilleur. Les récriminations et le deuil succédèrent à la guerre de l’Archipel, chaque faction rejetant la faute sur l’autre. Je passai des nuits sans pouvoir dormir, à pleurer des larmes d’impuissance, bouleversée par l’énormité des événements, mes entrailles nouées par une colère malsaine, désespérée. Des torts irréparables avaient été causés en notre nom. Et, à l’exception de quelques boucs émissaires, la plupart des responsables allaient échapper aux conséquences de leurs décisions, après avoir plongé la Généralité humaine dans le conflit le plus sanglant et le plus dévastateur de son histoire. Je vis la rage et l’amertume dévorer mes amis. Les esprits les plus brillants de ma génération furent consumés par la folie. Ils s’empoignaient sur les réseaux de communication en citant des vers d’Ona Sudak pour exprimer leur fureur existentielle devant tant d’injustice. Pendant un temps, je fus comme eux. Je ne savais pas quoi faire d’autre. Au lendemain d’une telle stupidité meurtrière, je me sentais désarmée. Je n’avais pas voulu la guerre, je n’avais pas voté pour elle. Plus d’un milliard de personnes avaient perdu la vie, pourtant il n’y avait eu aucune décision de prise. Le Conglomérat et l’Extérieur se cramponnaient à leurs idéologies respectives, de vastes pans de leurs territoires restaient inchangés, et leurs différends couvaient toujours sous la surface de la diplomatie et des discours de réconciliation. Avions-nous vécu cet interminable cauchemar d’autodestruction pour rien ? Tous ces combats, cette souffrance, ces morts, pour que des politiciens puissent prouver quelque chose ?

Dans ma rancœur désemparée, je n’avais pas trouvé la force de continuer à porter l’uniforme de la marine extérieure. Bien qu’ayant commandé une frégate médicale, j’avais vu de mes propres yeux ce qu’il se passait quand des hommes et des femmes abandonnaient leur individualité au profit de l’État – quand ils acceptaient de devenir des pions sur l’échiquier. C’est pourquoi j’avais démissionné. J’avais rejoint le personnel démobilisé qui s’agglutinait dans la froideur du vent nocturne sous les lampadaires de tous les spatioports, se demandant s’ils pourraient revenir à leur ancienne vie après tant d’années de violence déshumanisante. Alva Clay avait choisi de rester avec moi, mais je n’avais pas la moindre idée de quoi faire ni d’où aller, jusqu’à ce que je rencontre George Walker par hasard, dans la cabane à thé d’une favela située à l’orée d’un désert, sur une planète paumée dont je ne me rappelais même pas le nom.

« Venez sur Camrose, me dit-il. Enrôlez-vous dans la Maison, comme nous.

— Qui ça, “nous” ? »

Il sourit. Il avait les cheveux gris et un regard empli de douceur. « Moi et la nef. Vous avez peut-être entendu parler d’elle.

— Comment est-ce qu’elle s’appelle ?

— Chien à Problèmes.

— Ça ne me dit rien, non.

— C’est un Carnivore du Conglomérat. Elle a combattu sur Pelapatarn.

— Comme beaucoup de vaisseaux.

— C’est vrai, mais elle a été la première à démissionner. »

Je cillai. « Elle a quitté la marine ? » C’était la première fois que j’entendais une chose pareille.

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